back to top
Droit des sociétésSociétés sans personnalité juridiqueLa société en participation (SEP) : une société sans personnalité juridique

La société en participation (SEP) : une société sans personnalité juridique

La société en participation (SEP) est un type de société particulier dans la mesure où ses associés ont décidé délibérément de ne pas la doter de la personnalité morale. Elle n’est donc pas immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés (RCS), n’est pas soumise au formalité de publicité légale (puisque c’est l’une des raisons motivant ce choix de forme juridique). La SEP n’existera donc que dans les rapports entre associés. Elle est régie par les articles 1871 à 1873 du Code civil.

Pourquoi une société en participation, c’est-à-dire une société sans personnalité juridique ?

Lorsque les associés décident délibérément de ne pas doter leur société de la personnalité morale se pose la question suivante : quelles sont les raisons qui motivent ce choix ? Le choix de la SEP concerne principalement dans 2 situations, bien particulières :

  • Coopération interentreprises permettant à plusieurs entités de poursuivre un programme de recherches exigeant et ambitieux ou de développer une stratégie de prospection de certains marchés (surtout à l’international).
  • Préservation du secret des affaires en permettant aux protagonistes de réaliser des opérations (commerciales, industrielles ou financières) discrètement => on comprend de ce fait pourquoi les associés en présence préfèrent agir sous couvert de la SEP qui n’existera pas aux yeux des tiers.

Quelles sont les avantages de la société en participation ?

La société en participation présente les avantages suivants :

  • Discrétion : N’étant pas soumise aux formalités de publicité légale, ni à l‘immatriculation au RCS, la société « n’existe pas » aux yeux des tiers. Elle est totalement invisible.
  • Simplicité de constitution et de fonctionnement.
  • Grande place à la liberté contractuelle : permet de réaliser certaines opérations qu’une société étant dotée de la personnalité juridique ne pourrait pas faire aussi vite ou discrètement (elles sont généralement limitées dans le temps et ignorées des tiers)

En principe, la SEP est occulte, mais peut être révélée aux tiers[1] si les associés agissent en tant que tels au vu et au su des tiers.

Quelles sont les caractéristiques de la SEP ?

Société civile ou commerciale

La SEP peut être à objet civil ou commercial. En règle générale, celui-ci est commercial. Si l’objet est civil, on applique alors le droit des sociétés civiles.

Absence de personnalité morale

La SEP n’a aucun patrimoine : chaque associé conserve la propriété des biens qu’il met à disposition de la société. Les procédures de sauvegarde des entreprises sont non applicables. Aucun engagement de la responsabilité pénale de la société n’est possible, aussi c’est celle des associés qui sera le cas échéant mise en cause. Elle n’a pas dénomination sociale, de siège social ou de nationalité.

Comment constituer une société en participation ?

Conditions de fond d’une société en participation

La société en participation requiert que soient présentes les conditions de validité de la théorie générale des contrats, mais aussi du contrat de société. La capacité commerciale est requise pour le gérant d’une société occulte, tout comme pour les associés d’une société ostensible (c’est-à-dire non occulte), si l’objet est commercial bien entendu.

La SEP comporte au moins 2 associés, qui peuvent être des personnes physiques ou des personnes morales. Les apports en nature n’entraînent pas de transfert de propriété, mais le gérant dispose de la jouissance du bien. A la dissolution, il est repris par l’associé qui l’a apporté, mais les statuts peuvent prévoir que les biens acquis lors de la vie sociale soient en indivision entre les associés. Il peut y avoir des apports en numéraire ou en industrie.

Conditions de forme d’une société en participation

La société en participation pouvant être occulte, aucun écrit n’est obligatoire, l’absence d’écrit ne faisant pas pour autant obstacle à l’existence d’un contrat de société. Bien évidemment, elle ne requiert aucune formalité de publicité (c’est parfois même le but). La preuve de son existence se fait par tout moyen [2].

Sanctions des règles de constitution

La société encourt la nullité de la société si le contrat de société est irrégulier (avec effet rétroactif). Cette action en nullité se prescrit par 10 ans si la société est commerciale, 30 ans si son objet est civil.

Organisation et fonctionnement de la société en participation

Droits et obligations des associés

La société fonctionne conformément au pacte social. À défaut de pacte civil, si son objet est civil, elle fonctionne comme une société civile, et si son objet commercial, comme une Société en Nom Collectif (SNC).

Les droits des associés

Les droits individuels

Tout associé peut être gérant, mais il est plus simple de désigner un gérant, associé ou tiers. Les associés doivent alors contrôler la société. Chaque associé a droit à une fraction de bénéfice. À défaut de disposition statutaire, la répartition se fait proportionnellement aux apports. Si la société en participation est de courte durée, la répartition se fait souvent une fois l’activité terminée. Chaque associé a droit de céder sa part dans les conditions prévues aux statuts, à défaut avec l’accord unanime des associés. En effet, la SEP se caractérise par la dominance de l’intuitu personae. Chaque associé a un droit d’information. Il peut y avoir un conseil de surveillance et un Commissaire aux Comptes.

Les droits collectifs

Tout associé a le droit de participer aux décisions collectives. Les associés ont toute liberté pour fixer les modalités de consultation des participants. À défaut de stipulation, les décisions se prennent à l’unanimité (ce qui souligne la force de l’intuitu personae dans la SEP).

Les obligations des associés

Les participants doivent libérer leurs apports et contribuer aux pertes dans les mêmes conditions que pour la participation aux bénéfices.

Rapport des associés à l’égard des tiers

Principe

Chaque associé contracte en son nom personnel et à ce titre, il est seul engagé à l’égard des tiers. En effet, la société en participation vise à limiter les relations entre les tiers et les associés.

Exceptions

il est possible pour les tiers d’agir contre les associés dans les situations suivantes :

  • Si les participants agissent en qualité d’associés au vu et au su des tiers (société ostensible). Dans ce cas, chaque associé est responsable à l’égard des tiers des actes accomplis, selon les règles de responsabilité suivante :
    • Responsabilité solidaire si l’objet est commercial
    • Responsabilité conjointe si l’objet est civil
  • En cas d’immixtion d’un associé, c’est-à-dire lorsqu’il laisse croire au tiers cocontractant qu’il entendait s’engager envers lui.
  • Si un associé profite personnellement d’un engagement pris par ses coassociés.

La gérance

Les associés nomment un ou plusieurs gérants à l’unanimité ou à la majorité statutaire. En principe, les statuts précisent ses pouvoirs. La responsabilité du gérant est double, vis-à-vis des associés d’une part, et des tiers d’autre part :

  • Vis-à-vis des associés, il doit :
    • Respecter les statuts.
    • Agir dans l’intérêt social.
    • Rendre compte de sa gestion, c’est-à-dire qu’il est responsable de ses fautes de gestion.
  • Tiers : En principe, il est seul responsable.

La transformation de la société en participation en une forme sociétaire

La transformation de la SEP en une forme sociétaire s’analyse comme une constitution d’une société nouvelle.

  • Selon la doctrine, la décision se prend à l’unanimité si on transforme la SEP en une société de personnes, même si la règle de majorité définie par les statuts est inférieure.
  • Transformation en SARL ou SA : si des apports en nature figurent à l’actif du bilan de la SEP, la désignation d’un Commissaire Aux Apports (CAA) est obligatoire. Elle se fait sur requête auprès du Président du Tribunal de Commerce.

Dissolution et liquidation

Dissolution

Si le pacte social ne prévoit aucune limitation de durée, tout associé peut provoquer la dissolution de la société, à tout moment. Les règles pour les causes de dissolution sont les mêmes que la SNC si l’objet commercial, que les sociétés civiles si l’objet est civil.

Liquidation

La liquidation d’une SEP est relativement simple dans la mesure où elle ne dispose pas d’un patrimoine social propre. Elle se fait alors en quatre étapes :

  1. Paiement des dettes sociales.
  2. Reddition des comptes par le gérant.
  3. Remboursement des apports aux associés.
  4. Reprise de son apport par l’associé apporteur en nature.

Éventuellement (s’il reste un actif) :

S’il s’agit d’un bien indivis ou acquis en cours de vie sociale :

    • Mêmes règles que lors du partage des successions.
    • Possibilité statutaire d’une vente aux enchères si les associés ne se mettent pas d’accord.

Les conditions prévues dans les statuts prévoient la répartition de l’éventuel boni de liquidation. En cas d’absence de clause statutaire, il est réparti proportionnellement aux apports [3].

En cas de mali de liquidation, les règles sont les mêmes.

[1] Loi du 4 janvier 1978.

[2] Article 1871 du Code civil

[3] Article 1844-1 du Code civil