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EconomiePolitiques publiques et décentralisationEau potable: faut-il organiser les Jeux Olympiques à Mayotte ?

Eau potable: faut-il organiser les Jeux Olympiques à Mayotte ?

Ah, Mayotte ! Ce département français où l’eau, bien qu’omniprésente, reste un luxe quasi inaccessible pour ses habitants s’agissant de sa forme potable. Alors que la Seine parisienne a réussi sa mue in extremis pour accueillir les Jeux Olympiques de 2024 à coup d’investissements colossaux, les Mahorais continuent de jongler avec de l’eau blanchâtre contaminée, quand ils ne subissent pas des coupures pures et simples… Peut-être faudrait-il donc que le 101ème département français accueille des Jeux Olympiques pour que l’investissement nécessaire soit fait ?

Une baignade à Paris, mais pas d’eau potable pour Mayotte

La Seine, ce fleuve mythique, a bénéficié d’un plan de dépollution ambitieux. Les autorités ont ainsi mobilisé 1,4 milliard d’euros pour en faire un site de baignade pour les JO. Certes les efforts ont (heureusement) porté leurs fruits. La qualité de l’eau a été jugée suffisante pour permettre aux athlètes de plonger dans ses eaux.

Pendant ce temps, à Mayotte, ce département français oublié, l’accès à l’eau potable demeure un défi quotidien. La situation est si critique que les habitants doivent souvent se contenter de stocks d’eau précaires, exposant leur santé à des risques sanitaires. Le concept d’or bleu n’a jamais été aussi approprié avec des tarifs oscillant entre 4 € et 5 € le pack de 6 bouteilles. Ce tarif pouvant même monter à 12 € les 6 bouteilles. Ce sont pourtant 42% de la population qui vivaient avec moins de 160 € par mois en 2018.

L’UNICEF sonnait pourtant déjà la sonnette d’alarme en mars 2024 :

À Mayotte, depuis le début de la sécheresse en mars 2023, les pénuries d’eau se sont intensifiées. Les retenues collinaires, réserves artificielles qui fournissaient 80 % de la population en eau ont atteint un seuil critique en fin d’année dernière.  Les familles passent alors plusieurs heures voire des jours sans eau au robinet. Et lorsqu’elle est disponible, elle est parfois blanchâtre ou contaminée.

« Avoir de l’eau potable à Mayotte est vraiment compliqué. On essaye de trouver des packs d’eau dans les supermarchés mais il n’y en a pas toujours et ça coûte cher » témoigne Wakidine, un habitant.

UNICEF, Mayotte : un accès à l’eau potable presque impossible

Eau (potable) et maladies : des polémiques tumultueuses et des réalités silencieuses

Alors que Paris brille sous les projecteurs des JO, des voix s’élèvent concernant la propreté effective de la Seine. En effet, certains athlètes auraient des symptômes s’apparentant à ceux d’une infection par Escherichia Coli (gastro-entérite). 

De l’autre côté, la situation mahoraise perdure inexplicablement sans bruit. Pourtant, la crise de l’eau n’y faiblit pas. Toujours en mars 2024, le même UNICEF rapporte :

Le constat est sans appel, Mayotte frôle la catastrophe. Et cette épreuve pèse lourd sur la santé et l’éducation des enfants.

Selon le Centre Hospitalier, les cas de diarrhées aiguës, de déshydratation et de gastro-entérites se sont multipliés, surtout chez les plus petits. La menace du choléra plane également sur l’île avec un premier cas détecté le 19 mars (à la veille des JO Paris 2024, ce sont 221 cas recensés, dont 14 cas en réanimation et 7 décès, ndlr). Dans les quartiers aux airs de bidonvilles, la promiscuité des habitations, l’absence de services d’hygiène adaptés et le manque d’eau potable favorisent une propagation rapide des bactéries.  Une telle épidémie serait un désastre.

UNICEF, Mayotte : un accès à l’eau potable presque impossible

Au-delà de la question de la qualité de l’eau distribuée, les infrastructures de distribution sont insuffisantes. Alors que les pouvoirs publics se battent pour que les athlètes aient le droit de se baigner dans la Seine, les Mahorais semblent avoir perdu leur combat pour un droit, pourtant fondamental, celui d’avoir accès à de l’eau potable.

Un contraste au goût amer

Le contraste entre Paris et Mayotte est plus que frappant, il est révoltant. D’un côté, la capitale française peut célébrer la renaissance de la Seine comme site olympique, fruit d’un investissement pharaonique. De l’autre, Mayotte, département français à part entière, voit ses habitants lutter quotidiennement pour obtenir ne serait-ce qu’un filet d’eau potable. Lorsque les athlètes olympiques plongent dans une Seine fraîchement dépolluée, les Mahorais, eux, jonglent avec les coupures d’eau pouvant durer jusqu’à quatre jours d’affilée. 

Des JO à Mayotte : la (seule) solution ?

Faudrait-il donc organiser des Jeux Olympiques à Mayotte pour que l’île bénéficie enfin d’investissements dignes de ce nom dans ses infrastructures hydriques ? Si Paris a pu transformer sa Seine en piscine géante pour quelques épreuves, Mayotte ne pourrait-elle pas, elle aussi, accueillir la planète pour des épreuves ? Imaginons un instant : « JO Mayotte 2124 : l’épreuve reine sera le 4x100m pour relayer l’eau du robinet avant la prochaine coupure ». Une perspective qui fait rire jaune tant elle est si tragiquement proche de la réalité actuelle.

En attendant les JO…

Comme on attend Godot, les Mahorais continuent de vivre dans une situation indigne d’un pays développé. Chaque jour sans eau potable est un rappel cruel de l’inégalité flagrante qui existe au sein même de la République française. Il serait grand temps que les autorités agissent pour que l’accès à l’eau potable ne soit pas un luxe, mais une réalité. Et que l’énergie déployée soit au moins équivalente à celle mise en œuvre pour un évènement éphémère.

Alors, devrons-nous attendre des JO au XXIIème siècle à Mayotte pour que l’eau potable y coule à flot ? En tout cas, la seule médaille d’or que Mayotte a d’ores et déjà remportée, c’est celle de la patience résignée face à l’indifférence.

Jean-Eudes SANSON
Jean-Eudes SANSONhttps://www.droit-compta-gestion.fr/
Fondateur de Droit-Compta-Gestion.fr (alias DCG.media) et d'Entreprendre-Maintenant.fr, je suis titulaire du DSCG (Diplôme Supérieur de Comptabilité & de Gestion) et d'une certification de Développeur en Intelligence Artificielle (IA). Parallèlement à mon engagement professionnel, j'ai fondé DCG.media pendant mes études. Ce site internet est né de ma conviction que la meilleure manière d'apprendre est d'enseigner, ainsi que de ma passion pour le numérique et l'éducation. Je suis aussi formateur et interviens en tant qu'expert indépendant dans différents organismes où je peux fusionner mon expertise acquise au sein des entreprises que j'ai pu fréquenter avec mes compétences en analyse de données et en gestion d'entreprise.