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EconomiePolitiques publiques et décentralisationComment distinguer décentralisation et déconcentration ?

Comment distinguer décentralisation et déconcentration ?

Dans notre pays, nous distinguons la déconcentration et la décentralisation, alors qu’il s’agit de 2 processus d’aménagement des territoires.

Dans notre guide sur les politiques de déconcentration et de décentralisation, nous allons vous expliquer quelles sont leurs différences, leur mode de fonctionnement ainsi que les objectifs recherchés par l’État par leur mise en place. L’impact sur l’organisation des collectivités territoriales est également analysé.

La déconcentration : Un déplacement géographique du pouvoir

Définition de la déconcentration

La déconcentration consiste, selon le Larousse, à donner davantage de pouvoir de décision aux agents du pouvoir central répartis sur le territoire, autrement dit à transférer certaines compétences au profit de fonctionnaires nommés par l’État et agissant dans le cadre d’une circonscription locale.

Concrètement, la déconcentration est le déplacement géographique du pouvoir central (État-gouvernement) vers la périphérie (déplacement du pouvoir du centre vers la province).

C’est un rapprochement physique de l’État vers sa population, un État qui reste présent.

En effet, la prérogative reste à l’Etat lorsque l’on déconcentre, contrairement à lorsqu’on décentralise. À cette fin, l’État s’appuie sur les instances politiques locales, telles que les préfectures de région, préfectures des départements vers lesquelles il opère un transfert de ses compétences, généralement vers les préfets (qui sont des représentants de l’État, selon l’article 72 de la Constitution de la Ve République). Les préfets agissent comme des directeurs départementaux des services de l’État. Ils ont eux-mêmes des subordonnés qui vont pouvoir exercer les compétences au niveau local. Le rôle de la préfecture est d’exécuter toutes les décisions du pouvoir central dans le pays.

Pourquoi la France a-t-elle déconcentré son administration ?

L’objectif pour l’État français était principalement d’accélérer la prise de décision locale tout en décongestionnant l’administration centrale.

Et le processus de déconcentration ne date pas d’hier en France.

En effet, c’est en 1992 que le projet a été amorcé sous l’impulsion de la loi ATR relative à l’administration territoriale de la République.

Un décret datant de 2015 a également permis d’éclaircir son cadre :

La déconcentration consiste à confier aux échelons territoriaux des administrations civiles de l’État le pouvoir, les moyens et la capacité d’initiative pour animer, coordonner et mettre en œuvre les politiques publiques définies au niveau national et européen, dans un objectif d’efficience, de modernisation, de simplification, d’équité des territoires et de proximité avec les usagers et les acteurs locaux.

Décret n° 2015-510 du 7 mai 2015 portant charte de la déconcentration

Comment s’organise la déconcentration en France ?

Dans notre pays, il s’agit d’un transfert de compétences de l’État à des autorités qui le représentent et qui ne sont pas pourvues d’une personnalité morale.

 

Parmi les autorités déconcentrées, on retrouve ainsi les préfets, les recteurs, les directeurs des finances publiques ainsi que les services déconcentrés des ministères.

Voici une liste non-exhaustive des services déconcentrés des ministères :

  • La direction départementale des territoires
  • La direction départementale de l’emploi, du travail, des solidarités et de la protection des populations
  • Les agences régionales de santé (ARS)
  • La Direction Régionale de l’Économie, de l’Emploi, du Travail et des Solidarités (ancienne Direction Régionale des Entreprises, de la Concurrence, de la Consommation, du Travail et de l’Emploi ou DIRECCTE)
  • La direction régionale des affaires culturelles (DRAC)
  • Les directions régionales des finances publiques (DRFIP)

Par contre, les maires disposent d’une double autorité : ils sont à la fois déconcentrés et décentralisés.

Les décisions prises par ces autorités sont prises au nom de l’État : c’est en cela que la déconcentration se distingue de la décentralisation.

La décentralisation : Un transfert du pouvoir

Définition de la décentralisation

La décentralisation vise à donner aux collectivités locales des compétences distinctes de celles de l’État. Une collectivité territoriale est une structure administrative distincte de l’administration de l’État qui doit prendre en charge les intérêts de la population d’un territoire précis.

Elle dispose de ce fait de son propre budget et de son propre personnel, de ses compétences propres et dispose de la personnalité juridique (personne morale).

L’objectif de la décentralisation est de transférer des compétences propres à l’État jusque là afin de partager le pouvoir et la prise de décision, et donc, par là, de proposer des solutions au plus près des territoires.

Par exemple, pour gérer un lycée, ce n’est plus l’État qui décide, mais la région à travers le conseil régional.

Le citoyen reste celui qui élit le décisionnaire, à travers le choix du Président de région, ou du maire. Le citoyen devient plus impliqué dans les décisions que dans les décisions étatiques, car les représentants de l’État sont plus proches géographiquement de lui, et les décisions plus proches du terrain.

Pourquoi la France a-t-elle décentralisé son administration ?

En 1981, le président François Mitterrand a fait le constat que la France avait besoin d’un pouvoir décentralisé. Initiée dans les années 1980, la décentralisation s’est ainsi faite de manière progressive sur 2 axes principaux :

  • Le transfert de la compétence vers les collectivités territoriales qui englobent des communes, des départements, des régions et des collectivités à statut particulier (comme par exemple, Paris ou Marseille) et d’outre-mer ;
  • Un regroupement de communes au sein d’établissements publics de coopération intercommunale (EPCI).

 

Point droit : les lois à retenir sur la décentralisation du pays

Le droit français a permis de mettre en place une politique décentralisée progressivement en 3 actes :

Le premier acte :

●       Les lois Defferre datant du 2 mars 1982 et du 7 janvier 1983

Le deuxième acte :

●       La loi constitutionnelle du 28 mars 2003 relative à l’organisation décentralisée de la République

Le troisième acte :

●       La loi du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales ;

●       La loi NOTRe du 7 août 2015 qui confie notamment de nouvelles compétences aux régions ;

●       Enfin, le projet 3D (Décentralisation, différenciation, déconcentration) dont l’objectif était de renforcer le pouvoir réglementaire locale en évitant le morcellement des collectivités a donné lieu à la loi du 22 février 2022.

Comment s’organise la décentralisation en France ?

Il faut distinguer 2 types de décentralisation :

  • Elle peut être fonctionnelle ;
  • Ou territoriale.

La décentralisation fonctionnelle fait référence au transfert de compétences que l’on met en place dans les institutions publiques, alors que la territoriale concerne uniquement les collectivités territoriales.

Dans un cas comme dans l’autre, les autorités bénéficient d’une autonomie financière et du pouvoir juridique.

Ainsi, en cas de décentralisation territoriale :

  • La région est en charge du développement économique, de l’aménagement du territoire et des transports non-urbains ;
  • Le département gère l’action sociale et l’aménagement de l’espace ;
  • La commune se charge des dossiers liés à l’urbanisme, au logement et à l’environnement.

Ici, région, département et commune connaissent parfaitement le rôle qui leur est attribué.

Alors que dans le cas de la décentralisation fonctionnelle, la gestion du service public est transférée par l’État ou la collectivité territoriale à un établissement public. Voici quelques exemples de rattachement :

  • Les centres hospitaliers universitaires à l’État ;
  • Les lycées à la région ;
  • Le service départemental d’incendie et de secours (SDIS) au département ;
  • Les hôpitaux, les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et les centres communaux d’action sociale (CCAS) à la commune.

Le principe de compétence est ici capital :

  • Pour les communes, les compétences ne sont pas énumérées : elles bénéficient de la clause générale de compétence ;
  • Par contre, elles le sont depuis 2015 pour la région et le département : depuis cette date, ils ne bénéficient plus de la clause générale de compétence.

Zoom sur le contrôle de légalité du préfet :

Le contrôle de légalité est une procédure qui vise à vérifier les actes pris par les collectivités territoriales et certains établissements publics. Le préfet a un rôle très important :

●       Il vérifie que les actes adoptés sont conformes aux lois ainsi qu’aux règlements en vigueur : ce contrôle est effectué a posteriori par un juge administratif qui a le droit et le pouvoir de sanctionner ;

●       Par contre, depuis 1982, les collectivités territoriales ne sont plus soumises à la tutelle du préfet : il n’a donc pas le droit de contrôler le caractère approprié de l’acte ;

●       C’est le principe d’indivisibilité de la République qui a rendu nécessaire le contrôle des actes des collectivités décentralisées ;

●       Cette mission du préfet est inscrite dans l’article 72 de la Constitution.

Quels sont les objectifs recherchés de la décentralisation et de la déconcentration ?

En mettant en place ces 2 processus d’aménagement des territoires, la République assure son bon fonctionnement. Complémentaires, leurs objectifs sont toutefois différents selon la politique appliquée et les entités concernées.

Les objectifs de la déconcentration

  • Diminution des frais de gestion
  • Diminution du nombre de fonctionnaires
  • Possibilité de baisser les impôts (si moins de fonctionnaires)
  • Amélioration du pouvoir d’achat des citoyens
  • Incidence positive sur les comptes sociaux

Les objectifs de la décentralisation

  • Pouvoir plus proche des réalités des territoires
  • Renforcement du rôle des acteurs de l’État
  • Meilleure efficacité, efficience et rapidité de traitement, de gestion et d’exécution
  • Amélioration de la satisfaction des citoyens
  • Meilleure efficacité de la répartition du pouvoir qui est moins central
  • Amélioration de l’organisation
  • Processus de décision du citoyen plus proche du terrain permettant l’émergence d’une « démocratie de proximité »

Que faut-il retenir de la déconcentration et de la décentralisation ?

Les objectifs de la déconcentration et de la décentralisation
Les objectifs de la déconcentration et de la décentralisation

Les processus de déconcentration et de décentralisation ne vont pas l’un sans l’autre. Il est par exemple impossible de mener une décentralisation optimale sans déconcentration des services de l’État.

Pour un bon fonctionnement de la République, les pouvoirs doivent également s’exercer en région ainsi que dans les départements et les communes.

Si les sujets liés à l’organisation du pouvoir en France vous interpellent, nos autres articles sur les collectivités territoriales et toutes les autres autorités devraient vous intéresser.

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